Monologue du nous
Après la lecture stimulante de "Prendre dates" (Ed. Verdier), j'étais pas loin de croire à la possibilité d'un Nous, à la possibilité d'un sursaut collectif.
Et puis vint Bernard Noël.
"Le Nous me paraît impraticable dans l'état actuel du monde".
C'est en partant de ce constant implacable que Bernard Noël construit son dernier ouvrage.
Soit Nous, révolutionnaires ne croyant plus à la Révolution parce que la politique, le militantisme, le syndicalisme, le discours médiatique ont fatigué l'espoir.
Il reste alors à ce Nous le désespoir et son énergie pour ne pas se soumettre à l'utilitarisme, à la consommation, à la pensée économique.
Mais après l'enlèvement non prémédité et la mort accidentelle d'un policier, le Nous devient Nous-quatre. Et ce quatuor pose les bases d'une action directe violente qui aboutira au projet d'un attentat suicide au sein d'une conférence de presse.
Mais comment concilier le désespoir de l'action avec l'espérance inhérente à toute communauté ?
Bernard Noël tente une réponse.
De notre côté, en refermant le livre, nous est revenu un vers de Tennyson cité dans La promenade au phare de Virginia Woolf :
"Et nous périmes chacun tout seul."